la crise de l'hopital

Publié le par pascal terrasse

La politique gouvernementale en matière d’hôpital

Plusieurs annonces ont placé ces dernières semaines l’hôpital public au cœur de l’actualité :

Qui conduit la Politique Hospitalière?

Le conseil de la Caisse Nationale d'assurance maladie a adopté, des orientations, dont l’une d’elles concerne la politique hospitalière.

Cette volonté d’intervenir dans le champ des établissements sanitaires est la conséquence de la loi de réforme de l'assurance maladie du 13 août 2004, qui lui a fixé un certain nombre de missions en la matière.
Le président de la FHF a réagi à cette annonce, dans sa conférence de presse du 17 janvier dernier. Il a rappelé la légitimité de l'assurance maladie lorsqu'elle souhaite informer les patients sur la qualité des services ou sur les systèmes de prises en charge. Mais ces compétences ne sauraient outrepasser celles de l'Etat. Dans le cadre de la régulation de l'offre de soins, la caisse d'assurance maladie peut intervenir en appui des services de l'Etat et non à leur place. Celle-ci propose
"d'accompagner les établissements en difficulté", ce qui pose un problème de légitimité.
La politique hospitalière doit relever, sans ambiguïté, de l’Etat, afin de garantir sa cohérence et son efficacité : On se demande maintenant qui décide : Le ministre et le Parlement ou bien leprésident de la CNAM?

La CNAM a également annoncé le 18 janvier dernier qu’elle souhaitait appliquer cette année la maîtrise médicalisée à l’hôpital : avec comme objectif, entre autres, de diminuer les prescriptions remboursées à 100%. Actuellement 3,1 milliards d’euros de médicaments sont prescrits à l’hôpital à des patients en ALD, dont 83% sont pris en charge à 100%. Les prescriptions de transports sanitaires, d’arrêts de travail. Elle souhaite également une amélioration de l’usage des antibiotiques et une plus grande utilisation de produits génériques. Elle compte signer des accords nationaux avec les représentants des professionnels de santé et les décliner au niveau régional.

Inquiétude pour le financement des hôpitaux publics en 2006

Bilan de l’année 2005

Les reports de charges 2004 sur 2005 ont été de 500M€ . Pour 2005, la FHF avait évalué les besoins à 5% et l’ondam était de 3,6%, ce qui représentait 700M€ de besoins de financement.

Ces besoins de financement ont été atténués par  :

- L’Augmentation par les hôpitaux du ticket modérateur payé par les usagers : de +20% à +60% pour un total difficile à évaluer mais qui se situerait entre 100 et 300 M€ .

- Les rallonges budgétaires décidées par les pouvoirs publics :

Ces mesures supplémentaires représenteraient 650M€ pour l’ensemble des secteurs : public, PSPH et cliniques. La répartition de cette somme entre les différents secteurs reste inconnue, mais il est probable qu’une partie importante soit utilisée pour compenser le dérapage du chiffre d’affaire des cliniques en 2005, et pour compenser la fin des aides " Aubry " pour le secteur des établissements privés non-lucratifs.

Donc, malgré ces financements complémentaires, il est probable que pour 2005 les besoins de financement des hôpitaux publics ne soient pas intégralement compensés.

Actuellement, nous ne connaissons pas encore l’ampleur des efforts qui ont pu être réalisés par les établissements aussi bien sur les achats que sur les éventuelles compressions de personnels. Ce qui apparaît cependant nettement c’est que les évaluations initiales de la FHF correspondaient bien à la réalité des besoins des établissements.

Perspectives pour 2006 :

Un sous-financement est prévisible en 2006 pour le secteur hospitalier public puisque l’ONDAM est fixé à +3,44%, alors que la FHF évalue les besoins minimum des hôpitaux à +4,32%.

Cela est d’autant plus vrai que pour l’enveloppe ODMCO, il apparaît que les 650M€ supplémentaires qui auraient dû être réintégrés dans la base (ils seront aussi nécessaires en 2006 qu’en 2005 !) ne l’ont pas été et que par conséquent la progression de cette enveloppe ne serait donc plus en réalité que de +2,46%. Cela représente donc potentiellement un écart de 2% avec les besoins des hôpitaux évalués par la FHF (+4,32%) ce qui équivaut à un besoin de financement de près de 830M€ en 2006.

Quelles solutions choisir : Les hôpitaux ne pourront pas continuer d’augmenter le ticket modérateur en raison du risque encouru en termes de diminution parts de marché au regard du secteur lucratif ; et de la charge reposant sur les usagers. On peut craindre que les hôpitaux n’utilisent, du fait des nouvelles règles comptables, leurs provisions pour investissement pour combler ce besoin de financement 

Il reste donc à espérer que le Gouvernement, comme il l’a fait en 2005, procède en cours d’exercice aux ajustements nécessaires…

Cette politique de gestion par la pénurie organisée des établissements publics tout en distillant des " rallonges "en cours d’exercice n’est pas acceptable.

La FHF a demandé une réévaluation réaliste et transparente de l’ONDAM à travers un projet de loi de finances rectificatif, et la mise en évidencede l’explosion des dépenses relatives aux achats de médicaments, qui expliquent en grande partie les difficultés budgétaires, auxquelles sont confrontées les établissements.

Une baisse des tarifs des actes hospitaliers pourrait toucher le privé et le public en 2006

Il est question au Ministère d’une baisse de 1% des tarifs des actes hospitaliers, qui toucherait le privé comme le public.
la FHF a estimé que si cette baisse se confirmait, les hôpitaux publics subiraient ainsi une baisse des prix qui découlerait essentiellement du dérapage du chiffre d'affaires des cliniques en 2005. Il y a au moins 1% de dérive en prévisionnel, et l’on parle de 5% de dérapage du chiffre d'affaires des cliniques en 2005. Si ces chiffres sont confirmés, il n'est pas normal que les hôpitaux qui eux se sont tenus à des coûts qui étaient prévus, subissent une baisse de leurs tarifs comme pour le privé.
Ce dernier souhaiterait d'ailleurs que le ministre de la santé, Xavier Bertrand, fasse connaître le plus rapidement possible "l'échelle des coûts publics qui sert de base au calcul de cette évolution tarifaire"

Pour 2006, la FHF a demandé au Gouvernement de la "transparence" que ce soit sur l'échelle de coûts ou sur les comptes des cliniques, et sur "la répartition des enveloppes entre psychiatrie, soins de suite et de réadaptation et hôpitaux locaux d'une part, et entre les établissements publics sous dotation globale et ceux du privé d'autre part".

Elle souhaite également l'équité de traitement "avec le secteur commercial" et "la suppression du processus de convergence tarifaire comme le suggèrent tous les experts dans la matière et comme le proposait d'ailleurs le ministre s'il n'avait été désavoué par sa majorité parlementaire lors de l'examen du PLFSS".

Les usagers premières victimes de cette politique

Après l’instauration d’un forfait de un euro par acte médical, la hausse du forfait hospitalier de 15% entre 2004 et 2006, et récemment la mise en place d’un forfait de 18 euros sur les actes médicaux lourds, les patients paient le prix fort de la politique gouvernementale.

À cela vient s’ajouter la hausse du ticket modérateur évoquée ci-dessus, qui a augmenté entre 20 et 60 % suivant les établissements l’an dernier.

Certains patients sont exonérés de ce ticket modérateur, comme les bénéficiaires de la CMU, d’une prise en charge à 100% pour les personnes reconnues en ALD ( affection de longue durée), ou les femmes enceintes. Les personnes ayant une couverture complémentaire doivent s’attendre à une augmentation de leurs cotisations puisqu’il en découle une augmentation de charge pour les mutuelles. Les personnes n’ayant pas d’assurance complémentaire vont être lourdement pénalisées, d’où une aggravation de l’inégalité d’accès aux soins. Pour certaines hospitalisations, le ticket modérateur peut atteindre 120 à 140 euros par jour.

Cette hausse est en partie due au changement de mode de financement instaurée l’année dernière : ’Etat ne compense plus les baisses de recettes sur le ticket modérateur, par conséquent certains hôpitaux ont relevé leur prix de journée dont dépend le ticket modérateur. Mais elle est aussi la conséquence de la politique d’étranglement financier du gouvernement qui a conduit certains établissements à augmenter fortement les tickets modérateurs à la charge des usagers pour trouver les ressources nécessaires pour équilibrer leurs budgets et permettre d’assurer la continuité du service public

 pascal terrasse

secrétaire national en charge de la santé au PS

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article